05 mars 2006

Des moines et de leur utilité maritime

Je vous parlais récemment du phare de la pointe Saint-Mathieu et de son monastère ; une jeune lectrice de Rome (Italie) faisait même remarquer qu'« Autrefois, on priait contre les naufrages, maintenant, on allume des lumières. » Si j'en crois un document sur lequel je suis tombé l'autre jour aux archives en cherchant autre chose, ça ne s'arrêtait pas là :


Archives nationales, fonds anciens de la marine, B2390

Il s'agit de la copie sur registre d'une dépêche envoyée par le ministre de la marine à La Roche-Aymon, archevêque de Reims et président de la commission des réguliers - commission instituée par Louis XV en 1766 suivant le souhait de l'archevèque de Toulouse, Loménie de Brienne, afin de réformer le clergé régulier français. Transcription pour ceux que la paléographie en miniature sur écran ne tente pas :

M. l'Archeveque-Duc de Reims.
a Versaille le 10 fevrier 1769.

Le compte qui m'a été rendu, Monsieur, des secours de toute espece que les gens [rayé : de l'Equipage] de mer sauvés du naufrage de la Gabarre du Roy la Dorothée qui s'est perdue vers la pointe de St. Mathieu ont tiré des Religieux [rayé : de l'abbaye] du monastere de ce nom m'engage à vous observer que leur maison est par sa situation de la plus grande utilité dans des cas de cette espece, et que la suppression dont elle est menacée, attendu que n'étant pas fondée elle ne peut entretenir le nombre de Religieux que le Roy exige dans chaque monastere, seroit regardée comme un evenement malheureux pour tous les gens de mer. Si vous pensez, Monsieur, que cette consideration puisse faire excepter de la regle generale la maison dont il s'agit, je vous seray très obligé d'en proposer la conservation et de vouloir bien m'informer du parti qui sera pris à cet egard.

J'ay l'honneur d'être avec le plus parfait attachement, Monsieur, votre &c.

Quelques remarques : d'abord, on ignore la nature des secours dont il s'agit. Les moines ont-ils retroussé leurs vêtement pour aller repêcher les marins ? Ou se sont-ils contenté de leur offrir dans un premier temps leurs prière et dans un deuxième un vin chaud ? Je n'irais pas fouiller dans les archives départementales du Finistère (qui a probablement récupéré les archives dudit monastère, au bout du compte) pour aller voir ça. Deuxième remarque : quelques années après (1782 je crois), on se décide à construire un phare à cet endroit, ce qui laisse à pener que la requête n'a pas été entendue. Si tant est qu'elle ait été écrite pour être entendue, ou simplement pour faire plaisir au prieur de la maison dont il s'agit.

Évidemment, tout ça n'a rigoureusement rien à voir avec les sujets qui m'occupe. Mais bon, vu que j'avais ça sous la main...

(And in other news: les échantillons envoyés par un médecin de Tréguier au ministère de la marine en 1786 n'en était pas vraiment, du marbre. Du marbre à Tréguier, faut dire, ç'aurait été un scoop.)

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