06 août 2004

Question d'échelle

J'avais quelque peu mis en sommeil cette rubrique, vu que si c'est écrire de l'histoire que je voulais, mon mémoire paraissait un meilleur endroit que le blog. Toutefois, l'apparition d'un autre blog d'historien (blitztoire) me motive pour le ranimer un peu...

Une question est en filigrane de nos discussion récentes sur ledit blog (un peu une tarte à la crème en méthodologie de l'histoire, j'ai bien peur) celle de l'échelle de l'étude historique. Échelle temporelle, ou géographique, ou tout ce qu'on veut.

En fait, la vraie mesure, c'est peut-être celle des sources : quelle quantité de sources est on disposé à étudier, et comment ? Difficulté, surtout pour l'historien débutant : on ne sait pas trop combien de sources on trouvera, sinon je pense que je me serais trouvé un sujet plus pointu que le mien... En matière de travaux académiques, la pratique semble être la suivante : en maîtrise, petit corpus bien fouillé :; en DEA, grand corpus survolé ; en thèse, c'est selon, disons un corpus relativement important et relativement fouillé. Regrettons au passage que les historiens de l'université française n'aient pas profité de l'occasion que leur donnait la réforme LMD pour réfléchir sérieusement à la question -- pas plus que les autres disciplines du secteur lettre, langues et sciences sociales d'ailleurs.

En tout cas, pour les maîtrises d'histoire moderne, le dogme semble être assez clair : quelques cartons, pas plus. Certains camarades préparaient cette année des mémoires tout à fait prometteurs en se basant sur un seul carton. La mienne est donc relativement aberrante, avec ses dizaines de cartons répartis sur cinq ou six dépôts -- et d'aucuns ici même jugeaient mon sujet étroit. Ce qui veut dire que je ne peux en aucun cas dépouiller la totalité des séries pertinentes et que ma récolte de données tient parfois plus de la chance que d'autre chose. Si j'avais su, j'aurais pas venu, ou en tout cas j'aurais borné mon sujet un peu différemment... Quoi que : la problématique qui a surgie de mes sources, c'est celle d'un tournant qualitatif dans ce qu'est une usine, alors que la révolution industrielle pointe le bout de son nez ; cela suppose évidemment une diachronie -- tant pis pour moi !

Mais la question d'un mémoire à fin académique n'est évidemment qu'un cas particulier. En terme plus général de méthodologie historique, on a vu dans les années 70-80 s'affronter les fans du quantitatif à la recherche des longues séries aux tenant de la micro-histoire et de l'étude minutieuse de documents spécifiques, à la recherche de leurs implications et de leurs hypertextes (employons le mot à bon escient, pour changer). Mais finalement il ne s'agit que de manières différentes d'extraire de l'information historique des sources.

le vrai problème, c'est lorsque vient le moment de s'éloigner des sources. Et ça, bien d'accord avec Zid, il faut savoir le faire. Ne serait-ce que parce que sinon, d'autres le feront à votre place, pour dire des âneries. La vogue de l'histoire a un corollaire, c'est l'explosion de la pseudo-histoire. S'éloigner des sources et de leur étude immédiate, c'est fatalement perdre de l'info. C'est ce que les cartographes appellent la généralisation : le passage d'une grande à une petite échelle, en ne gardant que ce qui est pertinent pour l'utilisateur de la carte que l'on est en train de produire. C'est sans doute ce savoir-faire qui caractérise l'Historien avec un grand H. Moi, j'en suis loin !

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